Interview : Le Slow Tourisme vu par Charlotte Simoni, fondatrice de Globethik
Le « Slow-Tourisme » qu’est-ce que c’est ? Est-ce compatible pour les entreprises ?
9.8.2024
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Le slow tourisme, c’est l’art de voyager en prenant son temps, en profitant du moment présent. Ce type de voyage éco-responsable s’adresse-t-il à tous ? Est-ce compatible pour une entreprise d’organiser un voyage « slow » pour un voyage de récompense ou voyage d’études ? Pour éclairer notre lanterne, nous avons interviewé Charlotte Simoni, fondatrice de Globethik, qui accompagne les tours opérateurs et agences de voyage à organiser des voyages éco-responsables. Nous avons travaillé ensemble pour faire voyager des étudiants entre Paris et Athènes, sans prendre l’avion, en train, ferry et bus.
Le « Slow-tourisme », vu par une ancienne journaliste de Capital spécialisée en finance qui a pris un virage à 90° pour se dédier aux voyages bas carbone
1. Le parcours de Charlotte
Initialement issue du droit, j’étais destinée à être conseillère en gestion de patrimoine. A la fin de mon master 2, cela ne me disait plus rien du tout et un peu par hasard, je suis tombée dans le journalisme (même si ça m’avait toujours plu). Pendant 10 ans, j’ai été journaliste spécialisée dans la finance, l’argent et les placements. J’ai terminé notamment chez Capital.
Puis en 2015, j’ai eu envie de changer. J’avais envie d’écrire sur des sujets beaucoup plus « société ». Juste avant de démissionner, je suis partie faire un voyage en Asie pendant 6 mois, et c’est là que Globethik a un petit peu germé dans mon esprit. C’est en 2017 que je me suis véritablement lancée.
Aujourd’hui, je suis toute seule sur Globethik. J’ai suivi une formation qui a été délivrée par l’institut de Formation Carbone qui s’appelle la méthode Bilan Carbone et qui permet de calculer les gaz à effet de serre d’une entreprise, d’un voyage, d’un événement, d’un salon … C’est un énorme fichier Excel qui est juste très très gros dans lequel tu rentres un certain nombre d’information pour calculer l’empreinte carbone.
2. L’histoire de Globethik
A l’origine, Globethik était une market place qui proposait des voyages touristiques durables à travers le monde. Et en même temps, ma conscience écologique a commencé à évoluer et je me suis aperçue, en entendant parler de plus en plus de bas carbone, de la transition énergétique qui était en train de s’opérer et que je ne connaissais pas du tout. Je me suis dit que ça n’allait pas avec mes produits, mes activités durables. Donc je me suis demandé ce que je pourrais créer qui correspondraient à ces normes de bas carbone.
C’est là que j’ai créé une agence de voyage qui proposait des séjours 100% en train, en Europe, depuis la France.
L’activité a démarré très fort. Je m’attendais à faire du B to C et en fait, c’est le B to B qui est venu à moi. Ce sont d’autres agences de voyage qui étaient intéressées par la vente des produits que j’avais développé en train, pour leurs catalogues de voyages.
Sauf que la crise sanitaire est passée par là et c’est un peu dommage car ça commençait à bien marcher. Parce qu’en plus de ça, j’avais développé pas mal de produits du côté de l’Angleterre, donc le Brexit n’avait rien arrangé.
Avec la crise sanitaire, j’ai eu un petit peu de temps pour m’intéresser de plus en plus à cette problématique de bas carbone. Je me suis rendu compte que j’avais envie de transmettre l’information aux professionnels du tourisme et de continuer les activités touristiques bas carbone.
Je me suis aperçue que du côté des agences de voyage et des tours opérateurs, il y avait un petit vide et une piste à creuser pour l’accompagnement sur ce type de prestation. C’est comme ça que j’ai lancé une société de consulting qui accompagne les professionnels du tourisme vers la « décarbonation » de leur activité. Quand je dis les professionnels du tourisme, ce sont vraiment les agences de voyage et les tours opérateurs, qui sont vraiment ma cible.
Je propose 3 offres :
- Une offre de sensibilisation de 3h qui est pour moi la base quand on veut se tourner vers le bas carbone
- Une décarbonation des activités d’une agence de voyage ou d’un tour opérateur
- La création de circuit bas carbone notamment en train pour que les agences de voyage et les tours opérateurs puissent venir étoffer leurs brochures
Mon gros + : je calcule l’empreinte carbone de tous les postes du circuit que je propose : le trajet, l’hôtel, les activités … et je permets à l’agence de voyage ou le tour opérateur de donner la comparaison au client vs un voyage moins slow + avion
3. Sa définition du « Slow-Tourisme »
Prendre le temps, ne pas se presser et prendre le temps de découvrir sur place le lieu qu’on visite. Aujourd’hui, c’est un peu la course à tout vouloir faire. On va en Ecosse pour 1 semaine, on va à Edimbourg, Glasgow, il faut faire ceci, cela … alors qu’en une semaine, il y a largement de quoi faire à Edimbourg, et les alentours, même si c’est à 20mn de train. Au lieu de visiter Madrid en voiture ou avec un guide, on va prendre un prestataire touristique local qui va prendre une journée pour présenter un quartier à pied ou à vélo.
Le slow tourisme c’est ne pas se presser mais aussi c’est déconnecter. Il faut choisir des hébergements, des moyens de transport qui permettent cette déconnexion au profit de la découverte du voyage, qui commence dès le premier moyen de transport.
Pour l’entreprise de mon conjoint, j’avais organisé un après-midi à Malaga, tournoi de pétanque et dégustation de tapas. La pétanque, c’est vraiment une activité slow. Il faut laisser le temps aux collaborateurs de pouvoir échanger entre chaque activité, réunion … C’est aussi ça le but de se retrouver. De laisser du temps aux personnes d’apprécier la compagnie de chacun, le cadre etc.
4. Le « Slow-Tourisme » en B to B – compatibilité, format, nombre, durée
C’est possible de combiner « slow tourisme » et voyage de récompense, incentive … si on a quelqu’un de très bon en com’ pour vendre un super storytelling !
Pourquoi ne pas proposer tout un après-midi dans les calanques de Marseille, avec un capitaine sur un catamaran pour faire de la pêche aux oursins, une « oursinade » comme on dit chez moi en Corse, on les pêche, on les coupe en 2, on met du citron, on les déguste, avec un petit vin blanc bien frais à bord, au soleil, ça vaut tout autre activité.
Pour le nombre de personnes, c’est difficile à dire car je suis spécialisée dans le sur-mesure. J’ai failli signer avec une agence à Toulouse spécialisée dans les groupes et j’étais d’accord pour réaliser les voyages jusqu’à 20 personnes. On peut aller jusqu’à 50 personnes avec quelqu’un qui connaît un peu plus le marché que moi.
Pour ce type de voyage en slow, il est important de faire participer les collaborateurs qui vont vivre cette expérience. Leur demander ce qu’ils aimeraient faire, quelles activités ils ont déjà fait (pour ne pas reproduire les mêmes) et choisir une thématique qui sera appréciée de tous, à chaque étape du voyage.
La durée idéale dépend du temps qu’on est prêt à donner. Le trajet doit faire partie du voyage, de l’expérience et ne doit pas être un moyen d’arriver à un but précis. Sinon, en slow tourisme, c’est trop long.
5. Le marché du « Slow-Tourisme » en France et à l’étranger
C’est encore aujourd’hui un marché mineur, mais qui est en train de s’ouvrir. Depuis la crise sanitaire, les gens ont redécouvert la France, et les vacances en France. Quand les gens partent en France, ils sont moins susceptibles de faire des sauts de puces partout. Ils ont plus tendance à se poser entre amis, famille, pour une semaine, dans un seul endroit. Donc c’est très naturellement que le slow tourisme se pratique en France.
Cependant à l’étranger, c’est plus compliqué. Les City Breaks ont une empreinte carbone importante au niveau du temps passé sur place, et pourtant, ça cartonne toujours autant. Les gens ne sont pas encore prêts à voyager en slow à l’étranger.
5. Est-ce que le « Slow Tourisme » est l’avenir du voyage ou y aura-t-il une alternative qui combinera rapidité et diminution de l’impact sur l’environnement ?
Bien sûr qu’un mode de transport plus rapide verra le jour. Une nouvelle ligne Paris-Berlin arrive.
Mais avant ça, l’expérience, le confort doit s’améliorer, pour donner encore plus envie d’apprécier son trajet ! Les Midnight Trains qui seront des « hôtels sur rails » vont apparaître en 2023. Les nouveaux trains OBB d’Autriche sont futuristes et proposent de tout nouveaux lits, le petit déjeuner …etc.
C’est important, car dans l’avion, on a le droit à une collation. Aujourd’hui, les voyages en train ne le proposent pas. Il manque encore cette notion d’accompagnement, de service, dans les prestations ferroviaires.
L’expérience est vraiment une notion importante dans le futur du Slow Tourisme. Cela peut même commencer avant le départ, avec l’envoi d’une box et des produits locaux de la destination, par exemple.
Le seul bémol que l’on rencontre aujourd’hui, c’est que le train est plus cher que l’avion. Mais ce n’est pas le train qui est trop cher, c’est l’avion qui n’est pas assez cher par rapport à ses émissions carbone.
6. Son voyage organisé le plus « fou » au niveau de la logistique
Le Paris-Athènes en train, ferry et bus que nous avons organisé ensemble, était vraiment quelque chose. En ce moment, je suis sollicitée pour un Bruxelles-Rabat. Les challenges ne sont pas finis !
Sinon un circuit coup de coeur : le Pays de Galles, on entend souvent parler de l’Ecosse, mais les Gallois sont supers et c’est un pays magnifique.
Vous en savez maintenant un peu plus sur le « Slow Tourisme ». Si vous voulez tenter l’aventure avec collaborateurs, pour une expérience sur-mesure et inédite, nous nous tenons à votre disposition pour en discuter ici.
Et si vous êtes plus intéressé par les événements éco-responsables, on vous en dit plus ici